Les sons et lumières en Lorraine cet été

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Au son du passé éclairé

Ils fleurissent dans nos nuits lorraines, dès qu’elles se réchauffent. Ils savent attendre la tombée du jour, même tardive, pour transformer l’ombre en lumière et le silence en musique. Projections sur façades ou spectacles avec figurants, les sons et lumières lorrains font tous référence à l’histoire de notre région, comme un hommage en diamant sur fond noir.

Stanislas ouvre le bal. Jeanne d’Arc suivra. Les gueules noires du pays minier viendront et les poilus chanteront. Le tour d’horizon des sons et lumières de Lorraine a de quoi donner un léger tournis historique. Mais ils offrent au moins ce choix d’allier plaisir, rêve et culture. Pour sonner la fin d’une chaude journée de travail ou de tourisme, les spectacles nocturnes séduisent de plus en plus. Loin du bronzer idiot.
Nancy l’a bien compris et a fait de son Rendez-vous Place Stanislas un 14 juillet quotidien. Chaque été, les projections en musique sur les façades de l’Hôtel de Ville, de l’Hôtel de la Reine, de l’Opéra, du musée des Beaux-Arts et du café Foy forment un carré d’or qui attire jusqu’à 400 000 personnes par été selon ses organisateurs.

Technique et poétique

La formule en est à sa deuxième mouture – la précédente se limitait à l’hôtel de ville – et offre cet aspect en cinq dimensions depuis 2011. Avec ses 220 mètre de projection linéaire, le spectacle se targue d’être le plus grand d’Europe. Particularité de l’installation, littéralement invisible en plein jour pour préserver a pureté de l’espace XVIIIème : elle est piloté via un réseau de fibres optiques qui court sous la place. Le tout est supervisé en direct depuis le siège de la société SpectaculaireS/Les Allumeurs d’images basée à…Rennes. Mais derrière les chiffres et la perfection technique, c’est surtout une belle histoire que les Rendez-vous proposent chaque soir entre le 15 juin et le 15 septembre. Et la Belle, c’est l’Histoire : cette année, une clin d’œil élégant, plein d’humour et de poésie vient rappeler le thème de la Renaissance que célèbre Nancy en 2013. En mettant en avant le patrimoine architectural de la place, le son et lumière permet d’y apporter un autre regard, une fois les spots éteints, les amplis endormis. Car les sons et lumières ont cette qualité, ils caressent simplement une pierre ou lieu pour s’effacer ensuite. Tambours, trompettes et puis s’en va.

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Toute la Lorraine s’y met

Un peu plus loin dans la saison estivale, les villes de Toul, Verdun, Domremy et Petite-Rosselle donnent ensuite de la voix et de la couleur. Toul met en valeur sa cathédrale, Verdun rend hommage à ses poilus, Domremy évoque l’épopée de Jeanne d’Arc et Petite-Rosselle retourne dans la mine pour en extraire du rêve. Meurthe-et-Moselle, Vosges, Meuse et Moselle, les quatre départements lorrains ont désormais leur son et lumière, cultivant leur particularité historique et proposant d’ailleurs des concepts assez différents. Quand Verdun joue la carte pyrotechnique, Domremy avance une nombre impressionnant de figurants au regard de la taille du village : 150 ! Petite-Rosselle s’offre le luxe d’aligner 4 comédiens professionnels pour la première fois cette année (voir page suivante).
Les Lorrains sauront désormais comment attendre l’automne à la nuit tombée. Et s’ils en venaient à souhaiter que les jours raccourcissent ?

Alice Cimiez

Nancy, le bonheur est dans la place

Place Stanislas, 22h45. Les cloches tintinnabulent, les façades s’assombrissent et le silence se fait progressivement sur les terrasses. Pas de panique, juste un frisson de plaisir : on a rendez-vous avec Stanislas pour 20 minutes de voyage spectaculaire et de poésie monumentale. La place idéale commandée par Stanislas à son architecte Emmanuelle Héré s’anime, cinq des sept façades  qui encadrent la place s’animent, se colorent, vibrent et se transforment en écran géant – 220 mètres en panoramique – pour raconter Nancy, son histoire, ses grands hommes et se habitants d’aujourd’hui. « On a beau venir une bonne vingtaine de fois chaque été, on découvre toujours de nouvelles choses, se réjouit Anne venue avec ses deux enfants. La précision des projections est bluffante, quand les lignes lumineuses dessinent les fenêtres et les sculptures de la façade de l’Hôtel de ville, c’est magique. »

Magique technologie

Une magie possible grâce à une technologie de pointe quasi invisible. Les six vidéoprojecteurs installés sur les toits de l’opéra, du musée des Beaux-arts, de l’hôtel de la Reine, du Pavillon Jacquet , au dessus du Jean Lamour et de la boutique Daum se fondent dans le décor, intégrés aux matériaux des toits et des balcons, respectant au mieux ce site classé au patrimoine mondial de l’Unesco. Les 18 km de câbles et fibres optiques qui permettent la communication des données du spectacle ainsi que le retour d’informations techniques en temps réel à Nancy et à Rennes – où est installé le siège de SpectaculaireS – sont cachés sous les pavés de la place. Les conditions sont donc réunies pour la magie opère sur les pierres blanches de l’espace XVIIIe. Pour Benoît Quero, créateur de SpectaculaireS, le défi est de taille «  nous travaillons sur des lieux chargés d’histoire qu’il faut  respecter et magnifier. Pas question de s’en servir pour en faire un cours d’histoire ! Le vrai défi est d’écouter ces lieux, les gens qu’il les aime et les connaissent pour en faire un spectacle populaire, accessible aux jeunes, aux anciens et aux  touristes de passage. » Pour imaginer ce rendez-vous estival avec Stanislas, dix personnes. Et pas question de s’endormir sur ses lauriers, tous les ans il faut renouveler une séquence en fonction de l’actualité culturelle de la ville. En 2012, la séquence était consacrée au designer et architecte Jean Prouvé. Cette année c’est la Renaissance revisitée qui s’invite au cœur du scénario. Sur une musique éléctro, une Joconde en Ray Ban et nattes rasta ouvre le bal. L’homme de Vitruve de Léonard de Vinci s’anime, s’habille de rouge et s’échappe en faisant la roue pur laisser la place à une centaine de nancéiens photographiés une fraise autour du cou. Enfin, le DJ se montre – ce n’est pas Kavinsky qui a ouvert les festivités Renaissance – mais Erasme qui fait danser un Henri IV déguisé en rappeur, casquette siglée « I love Nancy » vissée sur la tête. Sur la place, les sourires ne quittent pas les visages des spectateurs émerveillés. « Le vrai bonheur consiste à faire des heureux » disait Stanislas. Mission accomplie.

A. C.

Tous les soirs à 22h45 jusqu’au 15 août, à 22h du 16 août au 15 septembre et à 23h15 les 14 et 27 juillet. Gratuit.

Verdun, Des flammes à la lumière

250 acteurs sur scène, 900 costumes, 1100 projecteurs, des effets spéciaux, … Un an avant le centenaire de la Grande Guerre, le spectacle “Des Flammes à la lumière” nous replonge dans l’Histoire avec un grand H.

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Bientôt un siècle, et Verdun continue à faire la Une des médias. Il y a quelques semaines, la découverte des corps de 26 poilus « morts pour la France » en 1916 à Fleury-devant-Douaumont rappelait que l’histoire est toujours présente au tous les week-ends de juin et de juillet dans la carrière de la Meuse. Cette histoire, leur histoire est racontée par des acteurs français et allemands dans les Carrières d’Haudainville, juste à côté de Verdun. Le spectacle commence à la Belle époque, dans l’insouciance jusqu’à l’attenta de Sarajevo le 28 juin 1914. Puis l’histoire s’emballe : les mobilisations, les combats… De février à décembre 1916, durant 3.00 jours et 300 nuits, des soldats, français et allemands vécurent en ce lieu, un véritable « enfer ». Des centaines de milliers d’hommes sont mobilisés dans un face-à-face cruel, au cours duquel plus de 300000 mourront, ensevelis dans cette terre de Meuse. Effets spéciaux, explosions et jeux de lumière plongent les spectateurs dans le conflit et ses grandes étapes. Les années s’égrènent, vient l’offensive américaine, puis la joie de l’Armistice, mais au prix de millions de disparus, d’invalides, de réfugiés… Les survivants témoigneront de l’horreur, de l’inimaginable… de la fraternité aussi.
L’événement-Spectacle « Des flammes à la lumière» est un hommage poignant à ces centaines de milliers de combattants.  Le spectacle s’achève sur une note d’espoir et « sur des  messages de joie et d’espérance, plus forts que les bombes et les baïonnettes. »

A. C.

L’histoire Tous les vendredis et samedis soirs à 23 h du 21 juin au 27 juillet. Tarif selon placement. Adulte de 20 à 25€, -15 ans de 12 à 15€, -7 ans de 0 à 5€ et réduit 15 à 19 €.
Plus d’infos sur www.spectacle-verdun.com

Petite-Rosselle, Fiers comme des Gueules Noires

LM09-004Imaginez-vous descendre à plus de 1000 mètres sous terre et partir à la rencontre de celles et ceux qui ont vécu une des plus grandes aventures industrielles de France. Après un an d’interruption, l’association « les Enfants du Charbon » revient en août avec un spectacle inédit et une envie : faire descendre 12 000 personnes sous terre et les entraîner dans ce qui était le quotidien des mineurs au siècle dernier.
Chevalements abandonnés et mines fermées. On a vite fait d’oublier qu’en Lorraine, il n’y a pas si longtemps le bassin houiller a fait vivre la région pendant des décennies. « La seconde moitié du XXe siècle a été marquée par l’ascension énorme de l’industrie minière. En 1957, on dénombrait en Lorraine 46 748 salariés, travaillant tous pur le bassin houiller et en 1964, 15,6 millions de tonnes de charbon ont été remontées des mines lorraines. Des chiffres qui pèsent encore sur les bras de ces hommes courageux et fiers » raconte Rémy Grosz, président de l’association les Enfants du Charbon. Pour raconter l’histoire des gueules noires, l’association a fait table rase du passé. Le nouveau spectacle écrit et mis en scène par Laurent-Guillaume Dehlinger, se veut en totale rupture avec ce que proposaient Les Enfants du Charbon. Passionné par l’histoire, le jeune metteur en scène de 33 ans souhaite « toucher le spectateur, lui faire vivre une expérience collective et surtout partager. L’histoire se raconte dans les livres, peut passer dans la bouche d’un conteur, se voir sur un écran, mais elle doit se vivre en spectacle, elle doit se mettre en scène et chacun doit en faire partie intégrante. » Pour transformer les spectateurs en gueules noires, en faire un personnage de l’histoire, les concepteurs du spectacle vont les plonger dans un univers virtuel. Avec un effet de descente en images, conçu par le jeune collectif nancéien Paradigme (à qui l’on doit le lancement des festivités renaissance sur la place Stanislas).

A. C.

Représentations les 15, 16, 17, 23 et 24 août au Parc Explor Wendel, à Petite-Rosselle.
Tarif : 20€, réduit : 18€, enfant (-10 ans) 6€. Billetterie et infos au 03 87 82 41 23 et sur
www.lesenfantsducharbon.com

La cathédrale s’enflamme pour Renaissance

LM09-005Cette année, le son et lumière de la ville de Toul se teinte de l’esprit de la Renaissance, rappelant que la cité épiscopale a connu un magnifique essor à cette période.

Année Renaissance oblige, la cuvée 2013 des Nuits Lumières d’une Cathédrale est entièrement consacrée à cette période clé pour la région et  pour Toul en particulier. « En matière d’architecture Renaissance en Lorraine, c’est à Blénod-lès-Toul que tout a commencé, explique Gérard Howald, adjoint délégué à la culture. La cathédrale Saint-Etienne cache en sons sein des trésors de cette époque, comme la chapelle des Evêques et le cloître de la collégiale Saint-Gengoult. »
C’est dans ce cloître, écrin idéal, que le public va embarquer pour un voyage dans le temps, de presque une demi-heure. Pour raconter cette histoire, les concepteurs du spectacle ont choisi une star de la Renaissance à Toul : le chanoine de la cathédrale Saint-Etienne en 1520, Jean Pèlerin dit le Viator. « Après avoir passé sa vie au service du Roi Louis XI, Jean Pèlerin se retire à Toul. En contact avec les plus grands artistes italiens de l’époque, imprégné des idées de l’époque, il joue un rôle précurseur dans l’histoire de l’imprimerie en Lorraine avec notamment la parution en 1505 du célèbre De Artificiali Perspectiva, le premier grand traité de perspective qui sera plusieurs fois réédité. C’était le narrateur idéal » poursuit l’adjoint à la culture. Installés sous les étoiles, les spectateurs assisteront  à un vrai show de lumières, de sons, d’images et de poésie. Les espiègles gargouilles, qui s’étaient tues l’année dernière, reviennent sur le devant de la scène pour dialoguer avec le chanoine, elles l’interpellent et lui parlent.
L’occasion de rappeler l’histoire de Toul et les événements marquants en France à la même époque, ses grands hommes, de Michel-Ange à Raphael en passant par Léonard de Vinci, Calvin ou Luther. Plus qu’un son et lumière, c’est une épopée fantastique.

Dates et horaires :
• Tous les jeudis, vendredis et samedis de juillet (sauf le 12) à 22h30 et en août à 22h.
• Tous les vendredis et samedis à 21h30 en septembre jusqu’au 14 Cloître de la cathédrale.
• Entrée libre.
 

Domremy, Jeanne d’Arc  superstar

Cela aurait pu être un événement unique, un souvenir époustouflant du 600e anniversaire de la naissance de Jeanne d’arc à Domremy. Mais le succès du son et lumière consacré à la vie de l’héroïne lorraine a donné des idées à l’association « Voix et lumière de Jehanne » pour continuer à mettre en valeur Domremy, lieu connu dans le monde entier et sa plus célèbre enfant. Pour ce deuxième opus, l’association a à nouveau fait appel au compositeur et scénographe vosgien Damien Fontaine, habitué des grands espaces, primé à de nombreuses reprises à la Fête des Lumières de Lyon.

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Pour célébrer Jeanne d’Arc sur les lieux même de sa naissance, le jeune metteur en scène a vu les choses en grand. 150 figurants, acteurs, musiciens costumés sur une scène de plus de 50 mètres d’ouverture et un scénario et des dialogues écrits par un historien racontant l’histoire de Jeanne d’Arc à travers le prisme inédit de la Basilique. Sur une musique originale aux accents électro, enregistrée avec l’Orchestre de Budapest, la façade de la Basilique et les bâtiments alentours se transformeront en gigantesque théâtre d’images en plein air, avec des décors en perpétuel mouvance et des effets spéciaux saisissants. « Les moments clés du spectacle reposeront sur de véritables mirages visuels, explique Damien Fontaine, d’étonnants séismes faits d’illusions d’optique où l’image détournera complètement la lecture convenue de la Basilique, la bousculant, l’écorchant, la réinventant et la remodelant sans cesse. » Une tempête de sable s’abattra par exemple sur le monument, l’édifice de pierre se transformera en château de sable « le vent s’engouffrant à l’intérieur le déshabillera par strates successives ». Au niveau technique, Damien Fontaine promet un spectacle un cran au dessus du précédent, avec 6 projecteurs d’images vidéo HD de très forte puissance, des faisceaux de lumière dynamique et une alchimie entre le spectacle virtuel et les scènes réelles jouées par des acteurs et des animaux.

Nouveaux effets, nouvelle histoire

Alors que le spectacle organisé pour le 600e anniversaire relatait la vie de Jeanne d’Arc de puis son enfance, l’édition 2013 se concentre sur le jugement de Jeanne en 1431, lors de son premier procès « dans lequel les Anglais se sont ingéniés à l’accuser d’hérésie ». L’association « Voix et lumière de Jeanne »  attend plus de 10000 spectateurs du 3 au 7 juillet. Peut-être entendront-ils les  mystérieuses « Voix », qui jadis soufflaient à la cime des arbres du « Bois Chenu », murmurant à Jeanne son incroyable destin, messagères de ce qui s’est noué entre ciel et terre à Domremy, il y a 600 ans…

A. C.

Tous les soirs du 3 au 7 juillet (22 h 30) à Domrémy-la-Pucelle. Entrées et packages : Adulte, 18€ ; VIP, 30€. Enfants, 12€ ; VIP, 20€. Plus de renseignements sur : www.spectaclemonumental-jeannedarc.fr